samedi 9 février 2013

la Révolution française, épisode 10 : Le Roi à Paris


Le Roi est de retour à Paris

Elles l’ont fait ! Car ce sont les femmes les héroïnes de cet événement sans précédent. Ce 5 octobre 1789, elles se sont réunies par milliers à Paris devant l’Hôtel de Ville pour y réclamer du pain. Puis est venue la décision d’aller réclamer leur pain à Versailles à l’Assemblée et chez le Roi lui-même. Toute cette armada s’est soudain mise en branle suite à de sombres nouvelles : le 1er octobre, le régiment de Flandre est arrivé à Versailles et a été accueilli à grand renfort de banquet et de vin ; la famille royale y ayant fait une apparition, a été ovationnée ; décision a été prise par les officiers d’arborer dorénavant la cocarde blanche royale, ou noire, emblème de la Reine ; la cocarde tricolore quant à elle, aurait été foulée au pied. Fausse rumeur ou vraie manifestation d’opposition à la Révolution, il n’en a en tout cas pas fallu plus pour échauffer les esprits de ces dames, les pousser à se rendre par milliers à Versailles, envahir l’Assemblée, envahir le château, tuer des gardes du corps du Roi et ramener ce dernier à Paris sous la protection de La Fayette, qui n’a pu faire autrement que d’accepter cet état de fait. Mais tout cela a-t-il été improvisé sous l’effet de la colère suite à une simple cocarde foulée ?
Certainement pas ! Un certain nombre de choses se sont combinées durant ce mois de septembre. La préoccupation quotidienne de la subsistance, n’a pas été réglée par les événements de l’été. L’émigration qui y a fait suite a atteint le luxe et tout le commerce parisien, le travail se fait rare, l’approvisionnement est toujours problématique pour les autorités parisiennes, les queues se sont reformées devant les boulangeries. Mr Marat, dans son Ami du Peuple, s’en fait l’écho régulièrement. A cela s’ajoutent des causes politiques.
Dès l’adoption de la Déclaration des Droits, le 26 août, les travaux de rédaction de la Constitution ont commencé. Mais rapidement, ces travaux ont été paralysés par deux grands problèmes. D’une part, effrayés par l’insurrection de juillet, une partie des constituants s’est mise à envisager la création d’une chambre haute sur l’exemple anglais, nommée par le Roi et forteresse de l’aristocratie. Ils projetaient ainsi de renforcer les pouvoirs de la noblesse et du Roi face au peuple. Mais nos députés les plus patriotes ne s’y sont pas trompés et ont bataillé ferme contre cette idée. Le problème s’est réglé dès le 10 septembre, par le rejet de cette idée à une forte majorité. D’autre part s’est posée la question de l’octroi d’un droit de véto royal sur les décisions du pouvoir législatif. Les partisans de la chambre haute le voulaient absolu, les députés patriotes n’en voulaient pas, à juste titre. Le Roi aurait ainsi tout loisir d’entraver le travail législatif. Ne refusait-il pas déjà de sanctionner les décisions de la Nuit du 4 août et la Déclaration des Droits ? Le 11 septembre, un compromis a été trouvé en accordant au Roi un véto qui suspendrait les décisions pour deux législatures. Les patriotes espéraient par là amadouer leurs adversaires, qu’on commence à appeler les monarchiens, et le Roi lui-même.
Rien n’y a fait, le Roi avait décidé de s’entêter, et même de reconquérir sa puissance perdue au profit de l’Assemblée. D’où la convocation du Régiment de Flandre. Le cher homme avait décidé de mettre son bon peuple au pas, ainsi que la Constituante, dont la majorité des députés ne lui était pas favorable. Ajoutons que toutes ces manœuvres des monarchiens, sur le Chambre haute et le véto, ne plaisaient pas du tout à Paris. L’idée s’est ainsi développée de soutirer le Roi à l’influence de sa cour de Versailles en le ramenant à Paris, de protéger et contrôler l’Assemblée nationale en la ramenant elle aussi à Paris. Donc, dès le 5 octobre au matin, cette idée était déjà dans les têtes, et les cris de « Le Roi à Paris ! » du 6 octobre n’ont pas été improvisés, lorsque ce dernier est apparu à la foule sur son balcon.
La déplorable situation des subsistances, la crise politique où les monarchiens ont tenté de conserver une position forte à l’aristocratie et au Roi, ce dernier ainsi encouragé à reconquérir son pouvoir ont remis le feu aux poudres. Les décrets d’août ont finalement été sanctionnés, « le Boulanger, la boulangère et le petit mitron » ont été ramenés à Paris. De là à ce que le pain réapparaisse en quantité et à ce que les crises politiques disparaissent…






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